Nous entrons au Cambodge par la ville d’O’smach. A la frontière on nous indique qu’il faut payer 30 $ pour le visa plus 5 $ pour le traitement. Nous affirmons que nous ne payerons pas les 5 $ ! On nous répond « It is up to you… ». Hé oui le Cambodge est plus corrompu et moins développé que la Thaïlande. La route redevient une simple bande bitumée, les routes secondaires sont en terre et les vélos autour de nous sont à nouveau bien présents. Khmer est le mot qui désigne le peuple cambodgien ainsi que leur langue. A O’smach, petite ville rurale, il n’y a pas de bancomat. Heureusement nous pouvons utiliser les quelques bats thaïlandais qui nous restent ou des dollars. En fait, le dollar fait presque office de monnaie officielle et les real cambodgiens ne sont utilisés que pour la petite monnaie. Etonnant, sachant qu’au Laos et au Vietnam l’émission des dollars est proscrite. Le soir nous assistons à des combats de boxe thaïlandaise. Le jeune âge de certains boxeurs nous stupéfait. Mais c’est un sport national et les gens qui ont fait le déplacement et qui pour l’occasion ont acheté un billet semblent ravis. Il est vrai que dans ce petit coin de pays les divertissements ne sont pas nombreux.
La route est plate, le vent toujours dans le dos. On descend d’une centaine de mètres en passant du plateau thaïlandais au plateau cambodgien qui n’est qu’à quelques dizaines de mètres au-dessus du niveau de la mer. Nous traversons la campagne, les petits villages. Les champs de riz dessinent le paysage. Les enfants qui font des kilomètres à vélo pour se rendre à l’école profitent des étangs le temps d’une baignade. Les pêcheurs sont aussi très actifs dans ce qui semble être un grand réseau de canaux. Une grande partie du riz est encore récolté à la main. Les travailleurs des champs qui se déplacent sur des charrettes sont toujours bien couverts, malgré la chaleur, pour se protéger du soleil. Bien que les choses aient pu évoluer, la classe paysanne, reconnaissable par un teint plus foncé et des mains plus usées, fut longtemps stigmatisée. Dans la ville les conducteurs de taxi vont jusqu’à se laisser pousser les ongles pour prouver qu’ils ne sont pas paysans. En deux jours seulement nous arrivons à Siem Rieap, le but ultime de notre voyage que nous nous étions fixé en partant de Kunming. L’arrivée devient presque routine. Le trafic s’intensifie et les scooters parfois conduits par de très jeunes enfants remplacent les vélos. Souvent un enfant assis à l’arrière des deux roues s’amuse à nous regarder en passant et nous lâche un grand sourire. Les Cambodgiens sont plus discrets et timides que les Thaïlandais mais toujours d’une extrême gentillesse. Siem Rieap bien qu’étant une grande ville a su garder un côté traditionnel et agréable à vivre. C’est bien sûr les temples khmers remontant au X siècle qui sont le symbole de cette ville et le joyau du Cambodge. Le plus célèbre d’entre eux étant Angkor Wat. Nous croiseront beaucoup de statues du dieu Shiva symbole de l’hindouisme régnant alors. Les temples sont ensuite devenus bouddhistes. Le Bouddhisme étant de loin la principale religion au Cambodge. Les deux religions ont des similarités à commencer par le fait qu’elles trouvent toutes les deux leur origine en Inde. Nous sommes un peu irrités par le prix excessif des billets d’entrée de 20 $ par jour. Le parc a beau être bien entretenu, ses employés sont payés au lance pierre et les rénovations alimentées par des fonds étrangers. La frustration est encore plus grande lorsque nous visitons le village flottant de Chong Kneas. Les prix sont exorbitants. Le monopole est tenu par un privé qui reverse 55% à l’état. Ce dernier place suffisamment de policiers pour qu’un commerce libre n’ait pas lieu. La petite barque qui nous emmène est pilotée par deux habitants du village. L’embarcation ne leur appartient pas et ils reçoivent un salaire mensuel de 35 $, soit le prix de nos deux billets! Bref, les habitants très pauvres du village ne reçoivent pas grand-chose de ce commerce. Ils se retrouvent contraints de vendre des objets qu’ils ont fait et de récolter des dons pour l’école (flottante) du village. Les touristes chinois eux, comme à leur habitude, forment de grands troupeaux sur de grosses barques surélevées. C’est non sans arrière pensée qu’on les observe avec leurs gros objectifs en train de mitrailler en contre-bas ces pauvres gens. Nous aurions mieux fait d’aller voir le village flottant de Kompong Khleang qui reste immaculé et dont les visites sont organisées par les villageois. Nous passons quand même une journée formidable pleine de rencontres. Nous apprenons que le lac est sujet à de grandes crues suivant le cycle annuel de la saison des pluies. Il existe donc des ancrages à plusieurs hauteurs permettant aux maisons d’être déplacées au fil des saisons. Le dernier ouragan qui est passé par là a notamment fait de gros ravages, décimant une partie du village. Comme il nous reste quelques jours avant de rentrer en Suisse et que nous avons atteint Siem Reap notre but, nous décidons de rouler quatre jours supplémentaires en direction de la montagne sacrée de Khulen. Quel beau final! La montagne est couverte de temples et connue pour ses magnifiques chutes d’eau. Etant donné que l’endroit a été privatisé et qu’il faut à nouveau payer pour y accéder, nous décidons de faire un détour de plusieurs kilomètres par les champs de riz pour éviter le check point. Cette fois l’argent ira aux habitants de la montagne! Le détour fût laborieux. Trois rivières à franchir, des zones marécageuses, et des chemins ensablés! Mais quels rires lorsque nous rencontrions les paysans locaux, qui nous ont aidés à nous sortir de ce pétrin! Ereintés, nous arrivons aux chutes d’eau le soir. Comme les touristes sont déjà partis, nous les avons que pour nous. Le restaurant local nous offre une place pour mettre la tente et rouvre ses cuisines pour notre souper. C’est le frère de la tenancière qui nous sert. Il nous apprend qu’il doit payer un loyer exorbitant de 1800 $ par mois au propriétaire de la montagne, le même qui fait payer l’entrée au check point, une partie étant bien sûr destinée au gouvernement. Au petit matin encore une baignade avant de se remettre en route. Notre hôte est content. Il attend une cinquantaine de représentants russes dans la journée. Il nous indique le chemin à suivre pour visiter la partie non touristique de la montagne. Avant d’aller dans les villages plus isolés nous profitons de voir les 1000 Lingas, anciennes gravures sur roche dans le lit de la rivière ainsi que le Bouddha couché. La suite de la journée est faite de mauvaise route (si on peut appeler ça une route) sous un soleil de plomb, à travers les roseaux, parfois dans la forêt dense. A la recherche d’un endroit pour manger nous rencontrons une famille dont la fille travaille dans les cuisines d’un hôtel de Siem Reap. Ils nous offrent spontanément le dîner ! Il est de coutume de venir visiter les temples de la montagne sacrée. Les locaux apportent de la nourriture aux moines, qui en retour, leur donnent la bénédiction. Nous parlons de politique avec le mari. Selon lui une révolution populaire au Cambodge ne devrait plus tarder. Son pronostic est de deux ans. Un moine vient nous salué et nous offre une canette de coca-cola. Rafraichis et avec du sucre dans le sang, nous finissons cette rocambolesque journée en roulant jusqu’au village principal de la montagne : Anglon Thum. Nous posons la tente à côté de la petite épicerie locale. Le soir deux filles de 15 ans se joignent à nous. Après nous avoir poliment demandé si nous étions mariés et soulagées de notre réponse négative, elles s’assoient à notre table. Nous parlons de leur scolarité et de leur avenir. Nous réalisons que leurs projets ne diffèrent en rien de ce que pourraient souhaiter les jeunes filles européennes. Notre dernier jour sur la montagne est le plus épique. Après avoir passé l’école de Ta Penh où les enfants nous ont fait un accueil triomphal, nous nous engageons dans une descente de 300 mètres ultra raide sur un sentier à peine marqué. C’est un ancien de Ta Penh qui nous montre le chemin. Les vélos sont poussés, voire portés. Après une bonne heure de calvaire nous arrivons à Svay Leu. Nous disons au revoir aux porteurs de taro qui nous ont accompagnés pendant la descente. Essayant nous-mêmes de porter leur cargaison, nous réalisons que finalement, descendre les vélos, c’était plus facile. Ces porteurs descendent de manière régulière la marchandise pour un gain d’environ 30 $. A Svay Leu nous rencontrons un officiel du district. Son discours est tout autre, montrant une bonne image de son gouvernement. Selon ses dires, le gouvernement aide les ONG locales et beaucoup de familles rurales sortent de la pauvreté. Il y a quelques années encore, il était difficile de les convaincre d’envoyer leurs enfants à l’école. Aujourd’hui le Cambodge se tourne de plus en plus vers la chine qui, contrairement à l’occident, fait des donations et ne demande pas en échange une bonne conduite du gouvernement. Il y a un article dans le journal « the economist » à ce propos: http://www.economist.com/news/asia/21715010-and-why-it-worries-cambodias-neighbours-why-cambodia-has-cosied-up-china?zid=306&ah=1b164dbd43b0cb27ba0d4c3b12a5e227 Et voilà! Après ces derniers moments d’une grande authenticité, nous prenons le bus pour Phnom Penh, la capitale. Nous irons encore visiter les mémoriaux du génocide des Khmer rouges. Nous ne tenons pas à raconter ici ces atrocités mais nous regrettons que cette partie de l’histoire ne fasse pas partie du programme scolaire en Suisse. Après Phnom Penh, direction l’ile de Koh Rong où nous irons couler quelques jours tranquilles sur des plages féériques. Nous rentrons en Suisse en passant par Kuala Lumpur où nous rencontrons des amis pour fêter Noël. Plus tôt qu’on ne l’aurait souhaité, nous voilà de retour à Kloten. Fini l’humidité chaude et pesante, la température n’est que de quelques degrés au-dessus de zéro. C’est sous un soleil blafard rasant l’horizon que nous roulons les derniers kilomètres depuis l’aéroport jusqu’à nos chaumières respectives. Ce voyage de rêve, longtemps souhaité est alors réalisé! Nous rentrons émerveillés avec pleins de souvenirs à partager. Nous sommes heureux et mesurons la chance qui nous a été donnée de ne pas avoir eu de gros pépins. Merci de nous avoir suivis tout au long de notre périple. Romain de Luze et Julien Dupont
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Quelques derniers kilomètres au Laos et nous arrivons à la frontière thaïlandaise. Les deux pays sont reliés par le pont de l'amitié, qui nous réserve une surprise: on y roule à gauche comme ça sera d'ailleurs le cas en Thaïlande... Il nous faudra quelques kilomètres pour nous y faire et également changer notre rétroviseur de côté.
Qu'on y roule à gauche n'est pas la seule chose qui nous frappe en arrivant sur les routes thaïlandaises. Ces dernières sont également de bien meilleure qualité et plus larges qu'au Laos. Les voitures sont, quant à elles, pour la plupart relativement neuves et les gaz mieux filtrés. On le remarque donc rapidement: le pays est beaucoup plus développé que le Laos et que les autres pays de l'Asie du sud-est. Le niveau d'anglais de la population est également un cran en-dessus, ça nous facilite la vie! C'était par ailleurs un des seuls pays d'Asie du Sud-Est qui n'était pas une colonie française ou britannique, peut être que ça a du bon pour le développement. Ces bonnes routes, pratiquement aucune montée, ainsi qu'un vent très favorable (la première fois depuis bien longtemps) nous permettent de battre nos records de distance en une journée. On traverse la Thaïlande en 7 jours qui nous paraissent bien courts... Nous roulons en Thaïlande quelques semaines seulement après la mort du roi de Thaïlande qui était, semble-t-il, proche et aimé du peuple. Impossible de l'oublier, des affiches en sa mémoire fleurissent un peu partout et beaucoup de Thaïs s'habillent en noir pour faire le deuil. Il avait sans doute cultivé son côté sympathique durant ses 18 années passées à Lausanne :) (www.letemps.ch/culture/2016/10/13/jeunesse-lausannoise-roi-thailande). Notre passage coïncide également avec la date d'anniversaire de feu le roi. Pour le célébrer certains restaurateurs offrent le repas gratuitement! Une bonne surprise matinale et une façon idéale de commencer une longue journée de vélo. En parlant de nourriture, il faut dire qu'elle y est bien bonne! Nous ne trouvons pas facilement comme espéré les poulets au curry (c'est plutôt au sud du pays), rouleaux de printemps et autres, mais aussi les Pad Thai, salades de papaye, jus de fruits, etc. font notre bonheur. Les bières y sont également bonnes, et après une dure journée de vélo une petite "Chang", "Singha" ou encore "Leo" fait du bien. Impossible d'être en Thaïlande sans profiter d'y recevoir quelques massages à des prix défiant toute concurrence: il faut compter entre 5-10 CHF pour un massage d'une heure! Le massage traditionnel thaï a pour but de libérer des lignes d'énergie et faciliter la circulation sanguine. C'est fait en appuyant fort à différents endroits du corps avec les pouces. Les pieds et genoux sont aussi parfois utilisés, ça ressemble presque à de la torture, surtout lorsque les pressions sont faites sur les muscles fatigués par le vélo! Mais après coup, on se sent drôlement bien et prêt à repartir en selle. Après 4-5 jours de vélo en Thaïlande, nous faisons une journée de pause à Buriram, une ville estudiantine. Nous en profitons pour discuter avec des locaux, faire un peu la fête et bien entendu... bien manger! Le lendemain de cette pause, nous visitons le magnifique temple khmer de Phanom Rung: pas de doute le Cambodge et Angkor Wat se rapprochent à grand pas! Le Cambodge sera la dernière étape de nos 6 mois à vélo. Nous entrons au Laos depuis la Chine par le seul point de passage pour touristes de Mohan-Boten. Bonne surprise, la Suisse est un des rares pays pour lequel il n'y a pas besoin de visa. Cela nous épargne par la même occasion de devoir payer la petite taxe de traitement supplémentaire appliquée lors de demandes de visa et qui est tout à fait inexplicable. La corruption au Laos est bien présente. Le Laos est aussi le pays le plus bombardé et miné au monde. Prière donc de rester sur les chemins, le camping sauvage au milieu des champs on oublie! Ces aspects négatifs sont vite effacés par l'accueil bien que timide mais très chaleureux des laotiens! Nous traversons de rustiques villages faits des huttes en paille ou en tôle. Les hordes d'enfants nous saluent voire nous sautent dessus pour nous taper dans la main à notre passage. Après la Chine où il y avait l'ancienne route, la nouvelle route et la dernière en construction (à chaque fois avec plus de ponts et tunnels), il n'y a plus qu'un tracé au Laos qui date du colonialisme français. Le trafique est faible et le côté rural relaxant! La route est le meilleur moyen de voyager au Laos qui manque d'infrastructures et qui n'a pas de réseau ferroviaire. Petite note culinaire: les repas sont épicés. La salade de papaye est une nouveauté avec de la sauce de poisson parfois un peu trop fort en poisson. Reste du colonialisme, on trouve des bagettes avec lesquelles sont confectionnés de gourmets sandwich.
Après quelques jours dans la campagne à travers les vallons parsemés de champs de riz, nous arrivons à Luang Prabang. Cette ville avec quelques autres a l'avantage de concentrer les touristes au même endroit et de ce fait le reste du pays est relativement immaculé. Nous faisons donc notre petit sentier touristique et visitons en bateau les caves de Pak Ou sur le Mekong et les magnifiques chutes d'eau de Kuang Si. Nous rencontrons Fred et Ophélie qui sont partis de France. Nous avons la chance de pouvoir essayer leurs vélos couchés avec espace de rangement pour les bières sous le siège! Le soir, l'atmosphère est à la fête dans les bars remplis de touristes en majorité américains et canadiens. Nous n'y verrons que très peu de Laotiens qui préfèrent un style de vie plus traditionnel orienté vers la famille. De plus les prix artificielement haut créés par le tourisme en rebute plus d'un. Conversation aux toilettes: "Hi I am from Canada! - Me too, it's unbelievable!" Deux minutes plus tard on se fait interpellés: "Do you know where Justin Biber comes from? - USA? - No, Canada. One point for me!". Ouf! On fini par rencontrer Alex un Laotien qui nous propose de le suivre pour continuer la fête chez lui avec ses amis. Belle échappatoire! Alex a étudié dans une business school de Bâle. Il vit du tourisme et vend des produits locaux en Suisse. Il nous fait visiter son entreprise. Nous découvrons un petit village au bord du Mekong où vit une petite communauté qui confectionne des foulards et autres pièces vestimentaires à l'aide de métiers à tisser. Alex est artiste et buisnessman. Lorqu'il propose un nouveau motif, le maître tisseur est capable de créer le programme (sans l'aide d'un ordinateur) qui donnera le résultat voulu. Il n'y a pas de livre pour expliquer la méthode, le savoir se transmet entre générations. Alex achète la soie et s'occupe de la vente. Le bénéfice est partagé en deux avec le tisseur. Pour un foulard à 100 dollars comptez un mois et demi de travail et 35 dollars de bénéfice. Il est difficile en tant qu'artiste de trouver des maîtres tisseurs et de gagner leur confiance. Trahissez une seul fois cette confiance et ils se tourneront vers quelqu'un d'autre. La communauté vivait autrefois plus en aval sur le Mekong. Ils furent chassés par l'ancient gouvernement qui a préféré vendre les terres à de riches chinois pour faire un golf. Toute contestation de la part des locaux pouvait mener en prison. Alex nous assure que le nouveau gouvernement est plus proche de la population. Après les scandales dans les plantations de bananes en mains chinoises où les pesticides utilisés causèrent des malformations chez les enfants et des problèmes respiratoires, le gouvernement veille désormais. Après la visite des ateliers, Tin, une autre artiste du village, nous invite chez elle et nous propose de choisir un canard dans l'enclos. Sang frais de canard et magrais au menu! Quelques jours de vélo plus tard, nous arrivons à la capitale Vientane après une côte des plus ardue! 1200 m de montée avec de longs bouts à 12%. C'est dans ces moments que la vitesse tombe à celle du pas et que l'on aimerait avoir quelques dents de plus sur la cassette arrière. Vientiane est marquée par la visite du musée des munitions non explosées. Le Laos, bien qu'indirectement impliqué dans la guerre du Vietnam, a vu quelques 2 millions de tonnes de bombes larguées sur son territoire dont 30% n'ont pas explosés. Malgré les efforts de déminage et la visite d'Obama, de nombreuses victimes dont des enfants sont à déplorer chaque année. Nous pensons à ces fermiers des années 60-70 semblables à ceux qui nous souriaient au bord de la route et qui virent leurs maisons et champs anéantis sans même savoir pourquoi. L'une des raisons est qu'au retour du Vietnam les bombes restantes à bord des avions devaient être larguées car il est trop dangereux d'atterrir chargé... Les jambes bien reposées après ces quelques jours de pause et c'est reparti!
Après une nuit (très, très) courte dans un wagon-lit entre Kunming et Dali (compartiment à 6 et les Chinois ronflent fort), nous retrouvons nos montures et avalons nos premiers kilomètres dans le sud du Yunnan. Le changement de paysages et de température est radical: après environ 200 km, nous nous retrouvons entourés de collines vertes où les Chinois cultivent absolument de tout: riz, thé, café, bananes, poires, etc. principalement en terrasses. Il n'y a quasiment plus rien de la végétation d'origine, c'est vraiment cultivé de partout! Mais ces paysages en terrasses donnent un vrai charme à la région et on y prend du plaisir à rouler. C'est donc plus les montagnes du Pamir, du Qinghai, du Sichuan ou du nord du Yunnan mais malgré tout on tourne à plus de 1000 m de dénivelé positif par jour, de sacrées petites collines... Au niveau des températures, c'est maintenant beaucoup plus tropical et humide. La saison des pluies est en principe terminée mais on s'est tout de même ramassé 2-3 belles averses. Comme un peu partout en Chine, le réseau routier est en développement constant et au milieu de ces collines, des autoroutes et des ponts énormes en construction sortent de nulle part. Nous avons eu l'occasion de partager un repas (et quelques verres) avec des employés d'un chantier qui nous ont expliqués rester 1 année dans la région loin de leurs familles: pas facile mais il semblerait que les salaires soient pas trop mauvais. Le Yunnan est également connu pour ses nombreuses minorités. On y trouve 25 des 56 minorités chinoises. D'une ville à l'autre la minorité principale peut changer. On trouvait par exemple les naxi vers Lijiang, les Bai à Dali et Hani vers Ni'ger tout au sud du Yunnan les dai, une minorité d'origine thaïlandaise. Pour la liste entière: http://www.yunnan.fr/mobile/ethnies-chine.html Le sud du Yunnan était aussi l'occasion de fêter les 30 ans de Julien. En résumé: énorme journée de vélo + pluie diluvienne (c'est censé être la saison sèche) + le soir une grosse fête et karaoké jusqu'au petit matin avec des chinois rencontrés sur place et avec Jérémy un français à vélo avec qui on a roulé 3-4 jours... Le lendemain c'était jour de pause. Quelques 10 jours après notre départ de Dali, nous arrivons à Mohan, ville frontière avec le Laos. Le lendemain, on change de pays et on se réjouit de découvrir une nouvelle culture et de nouveaux plats, les noodles c'est bon mais tous les matins c'est pas facile. Au revoir chères montagnes! Le Yunnan marque là fin des hautes montagnes. C'est avec quelques regrets que nous saluons une dernière fois les sommets enneigés. C'est aussi les Tibétains que nous quittons, leurs mines radieuses et leur accueil toujours chaleureux. Nous retrouvons la route G214 que nous avions quittée à Yushu pour éviter le Tibet. À présent on peut même lire notre date de naissance sur les bornes kilométriques. Y a-t-il des routes aussi longues en Suisse? Ne nous trompons pas, la région est très vallonnée et les mollets sont chauffés à blanc. Les bouts plats sont rares et le total ascendant journalier dépasse souvent 1000 m. Le paysage change, plus cultivé, mais toujours exceptionnel!
Nous visitons les villes très touristiques de Shangrila, Lijiang et Dali. Le changement de décor est abrute alors que nous croisons voies ferrées, autoroutes à quatre voies et bus remplis de touristes. Les vieilles villes respectives, pour la plupart reconstruites à l'identique, sont très prisées par un tourisme de masse principalement chinois. Le toc est apparemment bon pour l'economie du pays. Nous en retiendrons surtout la présence de Mc Donalds et de Pizzerias. Un régal après un régime de nouilles. A Dali, nous laissons les vélos et prenons le bus pour Kunming (7 milion d'habitants). De là Romain rentre en Suisse et Julien vole au Vietnam (Saigon) pour des vacances avec les copines! A l'aéroport, rencontre avec John un trentenaire grecque qui a tout quitté pour devenir prof d'anglais à Kunming. Les étrangers sont très prisés pour ces postes et reçoivent des salaires bien plus élevé que ceux de leurs collègues locaux. John a une femme chinoise et enfants. Il dit que la Chine lui donne plus de perspectives et de stabilité que l'Europe. Son cas n'est pas isolé, nous en rencontrerons plusieurs comme lui. Avec cette petite pause, nous profitons de vous remercier chers lecteurs pour tout les gentils messages que vous avez postés sur notre blog! Nous y répondons rarement mais nous vous lisons avec beaucoup de plaisir! Durant notre journée de repos à Batang, nous avons longtemps hésité sur la route à suivre: suivre le plan initial en continuant à longer la frontière tibétaine ou essayer (au risque de revenir en arrière) une route pour laquelle nous avions aucune information si ce n'est qu'elle apparaît sur les images de Google satellite, n'est pas goudronnée et qu'elle nous ferait franchir un col à plus de 5000 m. Finalement nous décidons d'opter pour le challenge et l'option 2!
Nous nous élançons donc de 2500 m et devons atteindre 5020 m sur 45 km, ça fait mal aux mollets... Comme prévu on a quelques surprises: parties de routes trop raides pour pédaler, d'autres parties qui ressemblent plus à des pierriers qu'à une route, ... Mais ça a valu le coup: paysages somptueux, passer la barre des 5000, camper à 4900 au bord d'un petit lac avec vu sur un massif à 6000 m, traffic quasi inexistant et sortir des chantiers battus! Le lendemain nous séjournons dans le village de Bomixiang, très isolé et où ils n'ont pas dû voir beaucoup d'étrangers (外国人: gens des pays de l'extérieur). Une famille nous accueille et c'est une nouvelle occasion de dormir dans une de ces superbes maisons tibétaines: beaucoup de peintures, des pièces très lumineuses et spacieuses, des photos du dailama un peu partout, etc. Le lendemain, un col supplémentaire et nous rejoignons la route initialement prévue. Après un peu de repos, nous attaquons notre dernier col à 4000 m du voyage. On a de la chance, on échappe au traffic durant toute la montée "grace à" un camion qui est sorti de sa route et les secours qui bloquent la route pendant des heures (on arrive à passer avec les vélos). Notre dernière journée au Sichuan (Benzila est la première ville du Yunnan) aura été comme le reste du Sichuan: pas facile. On pensait avoir 110 km le long d'une rivière et pouvoir se laisser rouler mais finalement c'était vent de face très fort et le dernier tiers de la route en construction avec des camions du chantier non-stop et de ce fait des nuages de sable... D'où nos têtes sur la dernière photo :). On a pu aussi apprécier les "super" conditions de travail des ouvriers qui font pêter de la dynamite et reste à quelques mètres de la détonation. Pas très agréable pour nous non plus, puisque personne nous prévient que ça va exploser! Après l'imprimerie de Dégé, 100 km de bitume et de descente plus loin, nous arrivons à Baiyu. Nous y visitons le temple qui couvre une colline prédominant la ville. Nous découvrons à chaque étage les différentes activités exercées par les moines et apprentis. C'est ici que l'on grave les planches qui servent à l'impression des prières. Poterie à base de Tsompa, musique et écriture y sont aussi enseignés. Il n'y a pas de touristes, nous rentrons à l'intérieur sans autre et sans payer la moindre entrée. Les moines, très acceuillants, nous offrent à chacun une de leurs prières. Le bitume ne durera pas et cédera la pace au gravier et à la boue collante qui se coince sous les par-boues. Sur la route menant à Batang deux cols s'enchaînent. La pente est rude, il faut parfois pousser les vélos. À plus de 4000 m dans les lacets nous faisons des micro-pauses pour reprendre notre souffle. La vitesse minimale pour ne pas tomber, le poid des vélos (45 kg), la pente et biensûr l'altitude nous poussent dans la zone d'essouflement. Nous campons deux fois, avant le premier col et après le deuxième. Entre les deux cols nous trouvons un hébergement dans un restaurant à Gaiyuxiang. Soirée simpas avec le patron et les serveurs. Gaiyuxiang est un(e) de ces villes/village champignons ou les coiffeurs travaillent déjà alors que les fenêtres et la peinture du bâtiment dans lequel se trouve leur salon n'existent pas encore. Les serveusent tibétaines nous disent ironiquement qu'elle doivent travailler pour un Han, éthnie chinoise majoritaire. L'arrivée à Batang, chef lieu du même County, se fait en douceur sur la haute route Chendu - Lassa juste avant le début de la "golden week". Nous nous reposons un jour à Batang et respirons un peu à 2600m. Nous observons la vie chinoise avec toujours autant d'émerveillement. Tout le monde est à la tâche. Il n'est pas rare de voir les femmes tirer les charettes ou porter sur leur dos de grosses pierres alors que les hommes se fument une clope. Les femmes accompagnent souvent leurs maris sur les chantiers où ils y travaillent ensembles. |